Au Sud du Caucase, la mosaïque ethnique et religieuse des trois Etats que sont l’Azerbaïdjan, la Géorgie et l’Arménie présente la même complexité que dans les Balkans ou au Liban. Reconnue Eglise d’Etat, l’Eglise apostolique arménienne rassemble l’écrasante majorité de la population. Avec l’exode des Azéris musulmans, elle n’a plus qu’à composer avec les chrétiens d’autres confessions.
La Turquie, ancien empire ottoman, est frontalière de l’Arménie. C’est sur ce territoire que s’est déroulé le premier génocide du XXème siècle. A partir de la deuxième moitié du XIXème siècle, un grand nombre d’exactions et de violences sont commises dans l’empire ottoman contre les populations arméniennes. Des centaines d’églises brûlées ou transformées en mosquées, des villages rayés de la carte, des personnes tuées… Ces massacres planifiés avaient déjà un avant-goût de génocide. C’est à cette époque que règne le sultan Abdul-Hamid II, surnommé le « Sultan rouge », qui fait le maximum pour dissimuler ces massacres, payant la presse pour acheter son silence. En avril 1909, le nouveau sultan Mohamed V est installé sur le trône par le groupe des « Jeunes-Turcs », officiers à l’origine du sentiment nationaliste turc. Soucieux de créer une nation turque racialement homogène, ils multiplient les atrocités contre les Arméniens dès leur prise de pouvoir.
Le samedi 24 avril 1915, à Constantinople, capitale de l’empire ottoman, 600 notables arméniens sont assassinés. C’est le début du génocide. Le gouvernement commence par déplacer les Arméniens vers Alep et des camps installés dans le désert de Syrie. Un cadre réglementaire est fixé le 27 mai 1915 avec la « Loi provisoire de déportation ». Les deux tiers de la population arménienne sous souveraineté ottomane disparaissent pendant l’été 1915. Dans une ultime phase, le gouvernement turc décide de liquider, de toutes les manières possibles, les personnes ayant survécu aux marches de la mort et étant parquées dans les camps de Syrie. Au total, le génocide a fait environ 1,5 million de victimes.
C’est seulement dans les années 1980 que l’opinion publique occidentale a retrouvé le souvenir de ce génocide, à l’investigation de l’Eglise arménienne et des militants de la troisième génération. Depuis lors, les historiens multiplient les enquêtes et les témoignages.
Quelques organisations travaillent à rétablir un dialogue entre les Arméniens et les Turcs. Eurasia Partnership Foundation a initié des programmes transfrontaliers pour la région du Sud Caucase ainsi qu’entre l’Arménie et la Turquie. Par exemple, un projet de voyage en caravane de journalistes issus des deux pays. Ils travaillent ensemble sur des sujets de sociétés et doivent traduire les articles des uns et des autres.
Plus de 100 ans après la fin du génocide, la paix entre les deux pays n’est pas encore trouvée mais une partie de la société civile s’est lancé le défi d’y travailler et de créer des ponts entre les populations.