Aujourd’hui, un réveil très matinal pour rejoindre la gare routière de Sarajevo : on avait 3h de bus pour rejoindre Srebrenica. Une étape incontournable de notre étude de la Bosnie, à laquelle on se préparait sans vraiment savoir a quoi nous attendre. A Srebrenica, il y a eu un génocide il y a 24 ans : les serbes-bosniens y ont assassiné plus de 8000 bosniaques en une semaine.
Le voyage en bus nous a permis de somnoler et d’admirer la beauté des montagnes. L’arrivée dans la ville est déjà une expérience en soi, la vue de l’immense cimetière nous a laissés un peu sans voix. 8 372 (le nombre de victimes connues actuellement) : c’est un chiffre effrayant mais désincarné. Voir 8 372 tombes, dont certaines ne sont même pas terminées tellement la mise en terre est récente, c’est déjà réaliser visuellement l’ampleur du massacre. La ville est silencieuse, à la fois très paisible et étrangement pesante.
Nous sommes entrés dans les immenses hangars qui accueillaient pendant la guerre le siège de l’ONU et dans lesquels on trouve aujourd’hui le mémorial du génocide : de grands bâtiments vidés, en partie brûlés, criblés d’impacts, laissés en l’état depuis la fin de la guerre. On a été accueillis par Amra , qui travaille au mémorial depuis 15 ans. Elle nous a raconté le contexte, la vie a Srebrenica avant et pendant la guerre, le rôle de l’ONU et de la communauté internationale… mêlés de son histoire personnelle, sa fuite, la séparation d’avec ses proches, la perte de son père et de son grand-père. Ensuite on a visionné un film avec des images d’archives et des témoignages. C’était presque insoutenable, et on a été vraiment bouleversés par l’expérience. Le témoignage des mères à qui on a enlevé leur fils, c’est ce qui m’a le plus émue.
Le musée est immense, il y a plus de 25 salles avec des images, des textes, des vidéos. Nous, on voulait tout lire, on arrêtait pas de se poser des questions les uns aux autres pour essayer de comprendre. Comme toujours face a ce type d’événement de l’histoire, on est un peu désemparés : on cherche une explication a toutes ces dérives sans vraiment les trouver. Un tel niveau de violence, ça s’explique mais ça ne se comprend pas. On a tellement tout disséqué qu’on a pas eu le temps de finir le musée avant qu’il ferme, petite frustration.
On a pic-niqué des sandwichs en relâchant un peu la tension, sur une pelouse en face du mémorial. On a été rejoints par un nouveau chien tout mignon, qu’on a appelé Alphonse-Ali cette fois. Un passage par le cimetière, où on a été marqués par toutes les familles qui viennent se recueillir sur les tombes de leurs proches. On les reconnait très vite, ils ont un regard vraiment différent de celui des visiteurs, et ils nous rappellent à quel point la guerre est récente.
Maintenant on est dans le bus du retour, encore tout pensifs. J’écris l’article et je crois qu’il est un peu long, mais c’est difficile de résumer en quelques mots l’expérience qu’on vient de vivre. Il va surement nous falloir un peu de temps pour la digérer !
Adèle