Depuis 2012, 4 équipes du programme InterFaith Tour ont recensé 950 initiatives dans 95 pays. Nous, la 5e équipe InterFaith Tour, avons souhaité mettre en lumière certaines de ces initiatives d’une autre manière : en connectant directement des jeunes françaises et français aux personnes engagées dans le monde entier ! De la Bosnie-Herzégovine à l’Allemagne, de l’Afrique du Sud au Pays de Galles, nous avons organisé des rencontres en ligne privilégiées entre des jeunes et ces actrices et acteurs de paix. Quelles sont les initiatives innovantes qui ont été promues lors de ces rencontres ? Comment de jeunes françaises et français s’en inspirent aujourd’hui pour construire une société plus résiliente ?
1. La mémoire, point central de la construction de la paix
Le 26 mai 2021, Daniel Error, fondateur de Youth for Peace, a présenté à une vingtaine de personnes sa vision du contexte de la Bosnie-Herzégovine et les actions menées par son association pour construire une plus paix durable. Ensuite, les participant·es se sont emparé·es de ces problématiques pour comprendre comment mieux agir ensemble en France.
La Bosnie-Herzégovine est un pays pluriel où le devoir de mémoire semble cruellement manquer d’après Daniel. Ce pays regroupe en effet différentes ethnies : les Bosniaques, majoritairement musulmans sunnites, les Croates, souvent catholiques et les Serbes, orthodoxes pour la plupart. Le souvenir de la guerre de 1992 à 1995, le génocide par les forces serbes de la population bosniaque et le massacre Srebrenica, où plus de 7 000 femmes et hommes sont froidement exécutés par les forces serbes, traumatisent encore les consciences. Daniel Error parle aujourd’hui d’une “guerre silencieuse” au sein de la population et l’état du pays ne semble pas s’améliorer. Fataliste sur la situation actuelle, Daniel nous confie avec tristesse qu’“On n’apprend jamais, les blessures sont encore ouvertes”. Il ne désire pas enseigner une “bonne histoire” mais il veut que chaque ethnie comprenne les différentes visions du monde et de l’histoire des autres. D’après lui, les leaders religieux ne semblent pas prêts à aider à la réconciliation entre les peuples à l’heure actuelle.
Face à cette situation très difficile, depuis 2013, Youth for Peace travaille avec des jeunes de 11 à 35 ans pour créer du lien entre les différentes communautés ethniques et religieuses de Bosnie-Herzégovine. Daniel et son équipe accompagnent en priorité des jeunes en foyer, familles d’accueil ou milieux défavorisés, et apportent des savoir-être et des savoir-faire nécessaires à leur évolution sociale. Leur objectif est de donner un exemple positif de la diversité, dans un contexte où l’éducation et les messages politiques ou médiatiques attisent les tensions et la ségrégation. Elles et ils organisent des séminaires, des conférences, des camps ou des tours interreligieux de la ville avec une double temporalité : en premier lieu, les équipes de Youth for Peace font travailler les jeunes sur des activités solidaires, pour leur permettre de partager des moments en commun et d’agir ensemble. Dans un second temps, elles et ils abordent les questions douloureuses liées à la guerre, pour permettre à tous de développer une meilleure compréhension des différents narratifs qui en résultent.
Les jeunes présent·es à la discussion en ligne ont été marqué·es par le témoignage de Daniel. Et d’après le formulaire présent tout au long de la rencontre, elles et ils ressortent de cet évènement avec l’envie de : “de davantage insister sur cet aspect mémoriel à l’école”, de renforcer “la sensibilisation”, de créer plus de “discussions autour des différents événements de l’histoire”, de lancer “des ateliers citoyens sur la mémoire, sur les monuments historiques”, “de demander aux enfants d’enquêter auprès de leurs grands-parents”, d’inventer “des jeux de rôles, société, escape game pour se mettre à la place de l’autre”, ou encore d’organiser des “visites interconvictionnelles de l’ancienne synagogue brûlée au centre de Strasbourg”. Enfin, voici quelques mots qui les ont inspiré·es pendant la rencontre :
2. Les jeunes, des acteurs et actrices du changement
En juin, cette rencontre a pu se tenir en présentiel avec des jeunes de Coexister France et de Coexister Deutschland. C’est l’équipe 5 d’InterFaith Tour qui a présenté certaines initiatives liées à la jeunesse.
Afin de promouvoir cette thématique, un Instalive a été organisé avec un membre de la 2e équipe InterFaith Tour : Samir a raconté le travail de l’ONG Peace Tech aux Philippines et fait un parallèle avec son propre parcours : https://www.instagram.com/p/CRCThBWq3Dn/
3. Comment la diversité religieuse peut-elle aider à répondre au défi écologique ?
Matthew Youde, ancien d’URI, United Religions Initiative, a partagé, le 5 juillet 2021, à une vingtaine de jeunes, en ligne, ses solutions pour construire une paix durable grâce à la diversité religieuse. Voici le lien de l’événement sur Facebook : http://urlr.me/YKM9D
Matthew nous a parlé de la manière dont l’interreligieux peut être un levier pour l’écologie. Tout d’abord, il a illustré comment l’interreligieux peut devenir un outil de plaidoyer pour l’écologie afin, par exemple, de mettre en avant des paroles des populations autochtones souvent très touchées par le réchauffement climatique, mais enclavées et peu audibles sur la scène internationale. Ensuite, il a expliqué comment organiser des évènements interreligieux beaucoup plus écologiques en pensant constamment à leur impact carbone. Enfin, l’écologie est aussi pour lui une manière de travailler : Matthew a par exemple négocié avec son employeur URI de ne jamais prendre l’avion en Europe et d’utiliser d’autres moyens de déplacement pour assurer sa mission de coordination de tous les groupes sur son territoire.
L’équipe 5 d’InterFaith Tour a parlé d’une initiative découverte par la 2e saison d’InterFaith Tour en Inde. En 2003, une communauté interconvictionnelle originaire d’Auroville décide de reforester une friche de près d’un hectare et de s’y installer. Elle est parvenue à recréer tout un écosystème sur la base d’un mode de vie en autarcie et écologique. Elle accueille des personnes de tous horizons culturels et religieux, qui sont invitées à séjourner le temps qu’elles veulent, pour participer au développement de son implantation tout en expérimentant la vie en forêt. Un espace de méditation commun ouvert à toutes les spiritualités permet à chacun·e de pratiquer sa foi. Grâce à son autonomie potagère, Sadhana Forest assure aussi la sécurité alimentaire des communautés avoisinantes. Depuis 2010, l’organisation est présente en Haïti et au Kenya. Le 7 juillet, c’est Léa, d’InterFaith Tour 2 qui a partagé une cette solution innovante découverte pendant son tour du monde sur Instagram : http://urlr.me/L3W6s
4. La lutte contre le racisme
Le 22 août, Sarah Oliver a présenté son action en Afrique du Sud à une vingtaine de jeunes. Sarah est directrice associée des programmes mondiaux pour l’engagement des jeunes de United Religions Initiative (URI). L’objectif de URI est de promouvoir une coopération interconvictionnelle durable et quotidienne, de mettre fin à la violence motivée par la religion et de créer des cultures de paix, de justice et de guérison pour la Terre et tous les êtres vivants. En activant l’engagement de URI envers les jeunes, Sarah s’efforce de soutenir, de mettre en relation, de fournir des ressources et d’inspirer les jeunes à travers le réseau, avec l’intention de renforcer la capacité des jeunes à diriger et à créer la paix dans leurs propres communautés et dans le monde.
Sarah travaille dans le secteur interconvictionnel depuis 10 ans, organisant des camps de jeunes, des ateliers et des formations, tant au niveau local que mondial. Dans le cadre de ces programmes, elle s’efforce de créer des espaces de confiance, de dialogue et d’apprentissage au-delà des clivages religieux et culturels. En tant que facilitatrice expérimentée, elle est passionnée par la connexion des questions de dialogue interconvictionnel, de leadership des jeunes et de justice sociale. Sarah a rejoint URI en 2016, où, par son rôle dans la région d’Afrique australe, elle a soutenu le développement de la campagne Girls Not Brides. les cercles de coopération URI au Malawi qui ont lancé le projet s’efforcent de mettre fin au mariage précoce des enfants et de soutenir les filles dans leur éducation. Avant de rejoindre URI, Sarah a travaillé pour le programme de citoyenneté mondiale de l’université du Cap. Elle y a conçu et animé des cours extrascolaires pour les étudiant·es, sur les thèmes de l’engagement communautaire, du dialogue et de la citoyenneté active. La quête de Sarah est de voir le monde interreligieux et pacifiste prendre au sérieux l’appel à la justice sociale mondiale. Elle pense qu’en associant la sagesse ancienne de nos traditions et de nos religions au feu de l’activisme social, nous pouvons créer un monde plus juste et plus pacifique sur le plan social. Au Cap, elle est également impliquée dans le GOAL Trust – une organisation de développement de la jeunesse, l’African Climate Alliance – un mouvement de justice climatique dirigé par des jeunes, et siège au conseil consultatif de la Cape Town Interfaith Initiative (CTII). Sarah est titulaire d’un diplôme spécialisé en anthropologie sociale de l’université du Cap.
Les participant·es à la discussion en ligne ont été très touché·es par le témoignage de Sarah et nous ont confié leur intérêt pour son action et veulent très probablement voir ce type d’actions en France. Le programme InterFaith Tour a répondu à ces attentes en partageant de nombreuses initiatives qui facilitent la création de lien social sur les réseaux sociaux : https://www.instagram.com/p/CSoKxdRj2_V/ ou https://www.instagram.com/p/CStFd_bjXCw/ ( ou de URI)
https://www.instagram.com/p/CSyJ3H0jO7H/
Instalive sur la thématique de la lutte contre le racisme : https://www.instagram.com/p/CTAfh6jF6nn/
5. Les droits des femmes et la construction de la paix
Au Week-End de début d’année de Coexister France, nous avons eu la chance de parler du rôle des femmes dans l’interconvictionnel et du projet que nous portons sur ce sujet derecherche. lors d’unea discussion en présentiel appelée : “Women of Interfaith”.Des membres de Coexister Deutschland ont témoigné de leur implication dans l’association en tant que femmes. Parmi les initiatives étudiées par InterFaith Tour, nous avons par exemple présenté la House of Sarah. Institution de l’Eglise anglicane aux Fidji qui lutte contre les violences faites aux femmes,Elle est en contact avec des mouvements féministes dans d’autres communautés religieuses du pays. Depuis 3 ans, l’organisation a créé le « Women of faith », un groupe de femmes chrétiennes, hindous, musulmanes et sikhs qui se réunissent chaque mois pour aborder la thématique des violences de genre. Elles ont proposé à des responsables religieux de toutes leurs communautés respectives d’apparaître à la télévision et au cinéma pour dénoncer ces violences puis ont publié un calendrier avec les photos de tous ces responsables religieux, et une phrase rappelant que les violences de genre sont des péchés. Ce calendrier a été distribué deux années de suite dans des églises, des bureaux et chez des particuliers.
La House of Sarah organise des ateliers et conférences dans tous les Fidji, à destination des femmes, mais aussi des hommes ou des jeunes, pour promouvoir l’égalité et lutter contre les violences de genre. Elle a également réussi à faire intégrer cette thématique dans les programmes scolaires des établissements publics ayant des cours spécifiquement dédiés à la religion. Afin de promouvoir cette belle initiative, nous avons eu la chance de réaliser un “Instalive” avec Floraine de la 4e saison d’InterFaith Tour sur la lutte contre les violences de genre https://www.instagram.com/p/CUamux7Fdwz/
6. Éducation, cultures et interreligieux
En partenariat avec URI et l’association ougandaise AFFCAD, nous avons co-organisé un “Connecting Café”, le 7 octobre 2021. Ce fut un échange constructif sur la jeunesse, les cultures et l’éducation. Nous avons pu parler de nombreuses initiatives avec des jeunes français et françaises mais aussi d’une vingtaine de nationalités différentes. Nous avons pu mettre en lumièreune initiative rencontrée par les équipes 1 et 2 d’InterFaith Tour qui se nomme : “Unconfessional School Wendenda Nicolas Depreux”. C’est une des rares écoles non-confessionnelles du Burkina Faso. Les enseignants, musulmans et chrétiens, ne sont ni des frères ni des imams, ni des chefs coutumiers, mais des laïcs formés à l’enseignement. Dans cet établissement, les 380 élèves, de confessions différentes, sont
habitués à étudier ensemble et peuvent parler très librement de leur religion et de leurs différences religieuses. Les échanges furent extrêmement riches,notamment grâce à l’implémentation des Breakout Rooms”, des petits groupes de discussion de ⅘ participant·es. Cette collaboration avec l’AFFCAD est une belle première étape avant de rencontrer Jafar, son responsable, et ses membres pendant notre étude de l’Ouganda dans les prochains mois ! http://urlr.me/C7cs6
Conclusion
Grâce au FONJEP, au MEAE, nous avons pu réaliser ces IFTalks en mettant en lien des jeunes internationaux et des jeunes français et françaises, même pendant la crise du COVID. Nous espérons poursuivre ces évènements pour ainsi inspirer, connecter et outiller de plus en plus de jeunes au niveauinternational.