PortraitsSaison 5

“Préserver les traditions des groupes natifs” avec Lenise et Thaiani du Centre Nowa Cumig

Portrait

🇫🇷 Thaiani nous a accueillies au Centre Nowa Cumig des Traditions Natives, fondé et dirigé par Athamis, sa mère qui est chamane. “Je peux raconter une petite histoire. En fait, c’est l’histoire de ma mère, mais ça fait partie de mon histoire, alors je vais la partager.” Athamis est née en Amazonie, de père indigène de la tribu des Mura mais elle a grandi avec sa grand-mère à Manaus, dans le Nord-Ouest du Brésil. Dans cette ville, les habitants cachent souvent la face indigène* de leur identité par peur des discriminations. À l’âge de 20 ans, la mère de Thaiani souhaite retrouver cet aspect caché de son histoire et s’élance pour le Canada, où elle est initiée à la tradition nord-américaine des Ojibways et appelée “The South Sister”.  “Maintenant, ma mère dit qu’elle est indigène. Je suis encore dans ce processus, je dois le dire, parce que mon père est blanc, de Belgique. Je suis donc à moitié belge et à moitié autochtone.” Thaiani a aujourd’hui 26 ans et ressent une profonde connexion avec les éléments, la nature, les animaux et la musique. Pour elle, le chamanisme est partout et en chacun. C’est une manière de croire en la vie, de respecter ce qui nous donne la vie. 

Engagée depuis des années au Centre Nowa Cumig, Lenise a beaucoup étudié et est devenue thérapeute. Pendant la pandémie, cette ancienne professeure d’anglais a été en première ligne pour aider les populations autochtones. Elle donne des cours de chamanisme dans le centre et y pratique des rituels religieux. Mariée à un Américain, la famille de son père est moitié portugaise, moitié italienne et celle de sa mère est descendante d’esclaves. Elle-même a été élevée dans le catholicisme et se dit aussi chamane sans que cela ne soit un problème. Riche de cette diversité, elle souhaite protéger les cultures natives et promouvoir une société brésilienne plurielle. 

L’organisation et ses actions

Lenise nous présente le centre Nowa Cumig comme un espace d’accueil et de confiance pour l’ensemble des personnes et communautés natives de l’Amazonie au Sud du Brésil. De toutes convictions et religions, leur diversité est célébrée. Le centre soutient les personnes dans le besoin et met en place des actions de plaidoyer et de mobilisation pour l’accès aux droits des personnes autochtones qui sont menacées et tuées pour la réquisition de leurs terres. Leur accès à l’université est lui-même limité. Or, comme elle le dit elle-même :

“Nous savons tous que plus nous avons de connaissances, mieux nous pouvons comprendre, mieux nous pouvons survivre.”


Tout s’est empiré avec la crise sanitaire et environnementale. “Nous sommes dans un moment très compliqué dans notre pays où les peuples indigènes ont souffert comme jamais auparavant, seulement quand les colonisateurs sont arrivés.” Au début de la pandémie, la famille de Thaiani a commencé à prier tous les jours en ligne à 18h, pour le monde, pour la santé. Cela a déclenché une grande campagne de soutien dans son réseau à travers la collecte de fonds et de produits de première nécessité en aide aux personnes autochtones.“Nous croyons que cela a contribué à la paix et à se battre pour la continuité de ce qu’ils sont.”
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“Ce n’est pas facile d’être une dirigeante féminine. Et comme je le disais, depuis la colonisation, les hommes ont pris le pouvoir.” Thaiani nous partage sa fierté du parcours de sa mère et aussi la difficulté qu’elle observe d’être une femme leader. La communauté du centre est essentiellement féminine et est très présente pour ses membres. Leur objectif est de sauver les traditions originales des groupes ethniques indigènes d’Amérique du Nord et du Sud, en offrant ce contact aux habitant·es des villes. Dans ce sens, elle organise des activités avec des représentants autochtones qui traduisent leurs cultures afin d’aider les habitants de la ville de Rio de Janeiro à mieux se connecter avec la Terre et l’Esprit de la Nature.

Le chamanisme

Le chamanisme est souvent mal perçu en Europe. Afin de mieux connaître cette spiritualité, Lénise et Thaiani nous ont décrit les voyages spirituels et la place fondamentale des instruments dans leur pratique : “Nous modifions notre conscience à travers les sons, les tambours ou les hochets, pour parler au monde invisible, aux esprits, pour demander de l’aide ou soigner.” Le chant qu’elles nous ont fait l’honneur d’écouter est dédié au début de la journée. Parmi ses activités annuelles, le centre propose des études sur la philosophie indigène Ojibway et plusieurs systèmes de guérison, ainsi que des rites de passage à vivre dans les moments déterminants de la vie humaine (naissance, etc). “C’est tellement important de montrer. Les gens doivent voir ce que nous faisons. Parce qu’ils peuvent changer. Et je pense que c’est le moment, définitivement c’est le moment.” La lutte contre les discriminations, la visibilité et la préservation de ces savoirs ancestraux poussent Lénise, Thaiani, Athamis et les membres du centre à participer aux manifestations interreligieuses organisées par le MIR (Mouvement Interreligieux de Rio de Janeiro) contre l’intolérance religieuse, aux concerts interreligieux ou à animer des ateliers éducatifs en ligne. Leur action idéale ? Rassembler pour le climat des personnes de différentes convictions dans un parc dans tous les pays du monde pour chanter, manger et parler de ses convictions puis partager largement l’initiative sur les réseaux sociaux et à la télé.Leur conseil ? Rester humble, garder confiance et pratiquer sa spiritualité.

🔥 6 ans après l’équipe IFT2, nous avons complété les données sur l’évolution de l’action du centre Nowa Cumig. Nous avons été marquées par la puissance de Lenise, de Thaiani, et celle de Athamis (qui était en France au moment de notre voyage à Rio 😅) à travers leurs voix !
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