Ce matin, c’était travail de fond ! Les filles sont allées dans un café car elles avaient besoin du wifi, tandis qu’Abderrahim et moi sommes restés à la maison pour surveiller la lessive. L’interrupteur de la machine à laver a souvent des faux-contacts et on doit la relancer plusieurs fois pour terminer un cycle de lavage. Pas très pratique mais on ne va pas se plaindre d’avoir des vêtements propres pour toute une semaine ! Vers midi, Abderrahim est retourné à la mosquée de Labinot pour la prière du vendredi, et j’ai rejoint les filles dans le centre de Pristina.
Une fresque splendide
Vers 17h, Philippe est venu nous chercher tous les quatre en voiture pour nous emmener au monastère de Gračanica. Avant de franchir la porte d’entrée, on a répété nos éléments de vocabulaire serbo-croate pour éviter les impairs. C’était la première fois de la semaine qu’on sortait de Pristina et qu’on devait abandonner la langue albanaise.
Accompagnés par notre guide, on est entré à l’intérieur de la petite église du monastère et découvert un merveilleux ensemble de fresques représentant des scènes de la Bible. L’édifice, qui date du 14e siècle, a survécu à l’époque ottomane sans jamais être détruit ni transformé en mosquée. La quasi intégralité des fresques est donc intactes. On a vraiment pris une claque devant l’incroyable splendeur de ce lieu. Malheureusement, les photographies étaient interdites : on ne pourra donc pas vous partager la beauté de ces fresques.
Un État « from scratch » (à partir de rien)
Philippe devait ensuite nous conduire à la rencontre d’un projet monté par des jeunes Kosovars de différentes communautés. Sur la route, il nous a beaucoup parlé de son expérience avec l’UNMIK depuis son arrivée en 1999. Il avait été envoyé pour une mission humanitaire, mais il s’est vite rendu compte que le challenge qui l’attendait était tout autre : reconstruire un État fonctionnel from scratch (à partir de rien).
À partir de 1989, les Serbes avaient écarté les Albanais de tous les services publiques : police, pompiers, hôpitaux, ramassage des ordures, etc. Quand ils se sont retirés du Kosovo en 1999 suite aux bombardements de l’OTAN, le pays s’est donc retrouvé démuni de ces services qui sont les organes vitaux de n’importe quel État. La première mission de Philippe au Kosovo a donc été de remettre des personnes compétentes à ces postes, puis de les payer. Pendant un temps, il a ainsi « fait office de » banque centrale kosovar et a passé ses journées à sillonner le pays pour aller payer les salaires des ambulanca locales (des petits hôpitaux de campagne).
Une soirée sous le même ciel
En temps normal, les événements auxquels on participe se déroulent plutôt dans la journée. Le soir on en profite pour décharger les vidéos, avancer sur les articles, etc. Mais celui de ce soir était un peu différent. Jana, la collègue de Philippe en charge de la jeunesse aux Nations Unies, nous avait prévenus : vous allez voir des jeunes incroyables, qui font bouger les frontières entre les communautés. Dès notre arrivée, on a fait la rencontre d’Andjela, Engin et Donjeta. Ils sont de communautés différentes (une Serbe, un Turc et une Albanaise), ils ne parlent pas la même langue (et communique donc en anglais) mais ils font plein de choses ensemble.
On est arrivés à l’événement Under One Sky, une vingtaine de jeunes étaient attroupés devant deux télescopes pour regarder les étoiles et les planètes. L’ objectif de ce soir c’était de rassembler des jeunes de communautés différentes pour découvrir l’astronomie. Et vu l’engouement des participants, on peut dire que c’est gagné ! Après avoir regardé Saturne et Jupiter, on demandé à Andjela Engin et Donjeta si nous pouvions les interviewer. Ils sont membres d’une association qui s’appelle “Youth United Task Force” qui a pour objectif de rassembler des jeunes de communautés différentes ici au Kosovo. Ils nous ont parlé de leur action “My Kosovo in one shot” qui consiste à inviter chaque participant à prendre une photo de leur vie quotidienne au sein de leur communauté pour ensuite organiser une grande expo photo ! On a trouvé que c’était un moyen original de faire découvrir le quotidien de chaque jeune en utilisant l’outil photo ! On a vraiment eu l’impression de rencontrer nos frères et sœur d’engagement en échangeant avec eux.
Après cette journée bien chargée, Philippe nous a raccompagné à la maison sur un air de Dalida. Un vrai moment de douceur !
Vincent